détention d'un compte à l'étranger : les points clefs à connaître



6 questions à se poser en cas de détention d'un compte à l'étranger

Chaque année, le contribuable, résident fiscal de France, doit déclarer auprès de l’Administration fiscale, en même temps que ses revenus, ses comptes et contrat d'assurance-vie détenus à l’étranger, directement ou indirectement par l'intermédiaire d'une société interposée.

Le non-respect de cette obligation peut générer de lourdes conséquences.

Cependant, les obligations liées à la détention de comptes étrangers ne sont pas toujours évidentes pour les contribuables qui souvent ne sont pas au fait de leurs obligations en France.

Aussi, et de façon non exhaustive voici 6 questions à se poser en cas de détention d’un compte étranger.

1- Quelles sont les obligations déclaratives des résidents fiscaux de France en cas de détention d’un compte à l’étranger ?


  • Conformément aux dispositions de l’article 1649 A du code général des impôts les personnes physiques domiciliées en France sont tenues de déclarer les références de leur compte à l’étranger.

L’obligation s’applique dès lors que le compte bancaire est ouvert, détenu, utilisé ou clos hors de France. Aussi, dès l’instant qu’un contribuable utilise un compte ouvert à l’étranger, il est tenu de le déclarer conformément aux dispositions de l’article 1649 du code général des impôts.

 Il s’en suit que lorsqu’un contribuable n’est pas titulaire d’un compte à l’étranger, mais qu’il bénéficie d’une procuration dessus, il doit le déclarer à partir du moment où il effectue des opérations sur celui-ci au cours de l’année d’imposition.

Par ailleurs, un compte ouvert alors que le contribuable n’était pas résident de France mais non clôturé au moment du transfert de résidence en France, doit être déclaré en France à partir de l’année à laquelle le contribuable devient résident fiscal de France.

A noter également que même en l’absence d’opération bancaire sur les comptes, l’obligation de déclaration reste applicable.
 
L’obligation de déclaration concerne les comptes bancaires, les contrats de capitalisation, les placements divers mais aussi les produits d’épargne, les contrats d’assurance-vie souscrits à l’étranger, les comptes de trading, les comptes sur des plateformes étrangères de crypto-monnaies…

Aussi, de nombreux contribuables possèdent des comptes étrangers sans le savoir. Ainsi, les contribuables qui ont créé, détenu, utilisé ou clôturé un compte en ligne auprès de N26, Monese, Bunq ou Révolut, par exemple, doivent les déclarer en France car le siège de ces établissements se trouve à l’étranger.
Les comptes PayPal peuvent aussi en principe concernés par les obligations de déclaration de comptes étrangers.

Cette obligation déclarative doit être réalisée pour chaque compte ouvert, utilisé ou clos à l’étranger au cours de l’année d’imposition.

Pour satisfaire à l’obligation déclarative, le contribuable doit joindre à sa déclaration des revenus un formulaire n°3916-3916 BIS.

La déclaration doit mentionner un certain nombre d’informations et notamment :

  • La désignation de l’organisme (avec son adresse) auprès duquel le compte est ouvert ;
  • L’intitulé du compte, son numéro, sa nature (compte ordinaire ou d’épargne), son usage (à titre professionnel ou personnel ou mixte) ;
  • Le type de compte (compte simple, compte joint, compte de succession, etc.) ;
  • La date d’ouverture et de clôture du compte.

S’agissant des comptes étrangers de cryptomonnaies, le contribuable doit y indiquer l’intitulé de compte, le nom de la plateforme d’échanges, l’adresse, le numéro et toute autre information sur le compte (date d’ouverture ou de clôture éventuelle).

Il convient en outre de cocher la case 8UU du formulaire n°2042 de sa déclaration des revenus.

  • Les revenus issus de comptes étrangers sont par ailleurs en principe imposables en France et doivent être déclarés sur la déclaration des revenus de l’année de leur constatation (formulaires n°2042, 2047 et 2074).

Tous les revenus crédités sur les comptes bancaires doivent être déclarés en remplissant les formulaires n°2042, n° 2047 et/ou le formulaire n° 2074 (pour les plus-values). Le formulaire n° 2074 est utilisé pour calculer les plus-values et les moins-values imposables pendant l’année de référence. Il permet de déterminer la plus-value globale et donc de déterminer l’impôt.


A noter que selon les accords signés entre la France et le pays étranger concerné plusieurs catégories de revenus de source étrangère devront être déclarées en France : il s’agit principalement des dividendes, des intérêts, des plus-values et des loyers générés dans un pays étranger, ainsi que les salaires et autres revenus professionnels. Il peut encore y avoir d’autres types de revenus pouvant être imposés, moins courants, mais qui ne doivent pas être négligés sous peine de s’exposer à des sanctions qui peuvent parfois être lourdes. Il convient donc d’analyser chaque situation au regard de la convention fiscale applicable.

2- Quelles sont les sanctions applicables en cas de défaut de déclaration d’un compte ouvert à l’étranger et/ou des revenus y afférents

L’arsenal légal en cas de manquement est important puisque les sanctions suivantes sont applicables :


Une amende de 1 500 euros par compte et par année d’omission, voire 10 000 euros si le pays n’a pas de convention d’échange de renseignement avec la France ; cette sanction n’est cependant applicable que sur une durée maximale de 4 ans. L'amende est donc plafonnée à 6000 euros par compte (4x1500 euros) lorsque l'année en cours n'est pas comptabilisée. Dans le cas contraire, l'amende sera appliquée sur 5 ans.

Attention, si le contribuable détient plusieurs comptes dans un même établissement, comme un compte épargne et un compte courant par exemple, il devrait payer le nombre d’années de détention x 2 x 1 500 euros d’amende. Cette double amende pourrait éventuellement être évitée si le contribuable parvient à justifier qu’il s’agit d’un sous-compte. Il devrait pouvoir démontrer notamment que les deux comptes ont la même racine de numéros de comptes et la même date d’ouverture des deux comptes.

L’article 1729-O A du Code général des impôts prévoit par ailleurs que cette amende peut être substituée par une majoration de 80% des rappels d’impôts qui découleraient du défaut de la déclaration du compte à l’étranger. La majoration de 80% ne peut être inférieure à l’amende de 1 500 euros (ou 10 000 euros).

  • Par ailleurs, si l’origine des avoirs ne peut être expliquée, une taxation à 60 % du solde le plus élevé du compte peut être appliquée.
  • De plus, il y a une présomption que les sommes figurant sur le compte constituent des revenus occultes, donc imposables sauf si le contribuable prouve qu’elles ne le sont pas.
  • Par ailleurs, en cas de non-déclaration de compte à l’étranger, le redressement peut porter non pas sur trois ans mais sur dix ans. Dès lors, l’Administration fiscale disposera d’un délai de dix ans pour redresser la situation fiscale du contribuable. Des impositions supplémentaires et pénalités pourraient ainsi être appliquées en matière d’impôt sur le revenu et d’ISF au titre des dix dernières années.

Exemple : nous sommes en 2024. L’impôt sur le revenu des années 2014 à 2023 et les ISF 2014 à 2017 peuvent être redressés. Concernant l’impôt sur la fortune (actif net supérieur à € 1 300 000), les années 2018 et suivantes ne sont en principe pas concernées puisque l’IFI a remplacé l’ISF et ne concerne que les actifs immobiliers.

Ces redressements seront à priori bien plus conséquents que les amendes et seront eux même majorés de 40% en cas de manquement délibéré, voir même de 80% en cas de manœuvres frauduleuses. A cela s’ajouteront des intérêts de retard au taux de 2,40 % par année de retard à compter de 2018 et de 4,80 % par année de retard avant 2018.

  • L’absence de déclaration d’avoirs détenus à l’étranger ou la soustraction frauduleuse à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts constitue un délit de fraude fiscale aggravée lorsque les faits ont été facilités au moyen de comptes ouverts à l’étranger. Ce délit est sanctionné par une amende de 3.000.000 d’euros et une peine d’emprisonnement de 7 ans. Peut s’ajouter une peine complémentaire de privation des droits civiques, civils et de famille (article 1741 du Code général des impôts).

3- Compte à l’étranger : de quelles informations l’administration fiscale française dispose-t-elle ?

De très nombreux pays (Portugal, Israël, Espagne, Suisse, Royaume-Uni, Luxembourg, Etats-Unis, Monaco, Jersey, le Liechtenstein, les Iles Vierges britanniques …) ont signé un accord international avec la France qui leur permettent de transmettre chaque année de nombreux renseignements sur les comptes situés sur leur territoire sans que l’Administration fiscale française ait à leur en faire la demande. Il s’agit d’échanges automatiques de différentes données bancaires.

Les banques doivent ainsi communiquer les informations bancaires des détenteurs de comptes bancaires sur leur sol s’ils sont résidents fiscaux dans un autre pays. Par exemple, une banque italienne devra identifier ses clients non-résidents fiscaux en Italie, identifier aussi de quel pays son client est résident fiscal, puis envoyer automatiquement au pays concerné les informations bancaires de son client.

Ainsi, les banques devront en principe transmettre les nom et prénom des titulaires du compte, le numéro du compte, sa date d’ouverture, son solde ainsi que les intérêts ou dividendes ou plus-values encaissés.

Ces informations seront envoyées automatiquement à chaque pays signataire ayant un résident fiscal qui ouvre un compte bancaire à l’étranger, dans un pays signataire également et cela, sans tenir compte de l’importance du solde du compte.

Ce n’est donc pas parce que votre solde est peu élevé que vous n’avez pas à vous soucier de ces démarches. Ainsi, cet accord international met, en principe, fin au secret bancaire afin de limiter la fraude fiscale.

Aussi, si l’administration fiscale découvre une fraude, les conséquences, pénalités, amendes pourront en certains cas être élevés. Comme mentionné ci-dessus, le contribuable risque une majoration de l’ordre de 80 % ainsi que des poursuites pénales, dans les cas les plus importants de fraude.

Il reste donc important de correctement déclarer ses comptes situés à l’étranger afin d’éviter tout contrôle fiscal.

4- Comment régulariser sa situation en cas de Non-Déclaration de son compte étranger ?

Depuis la fermeture du STDR (Service de traitement des déclarations rectificatives) au 31 décembre 2017, il n’existe plus de procédure normée de régularisation.

Or, de nombreux contribuables qui n’étaient pas concernés par la procédure de régularisation avant 2018, par exemple, car ils n’étaient pas résidents fiscaux de France à cette époque ou qu’ils n’ont eu connaissance de l’existence d’un compte étranger qu’au moment d’une succession intervenus après 2017, souhaitent aujourd’hui régulariser leur situation auprès de l’Administration fiscale.

Il reste possible pour le contribuable qui n’a pas déclaré ses comptes détenus à l’étranger dans les délais imposés par l’Administration fiscale de procéder à la régularisation spontanée de sa situation.

A noter que la plupart du temps, la préparation d’un dossier de régularisation en cas de non-déclaration de comptes situés à l’étranger étrangers est une démarche qui peut s’avérer complexe et chronophage qui implique une bonne connaissance technique des mécanismes fiscaux français dans un contexte international.

En effet, le contribuable devra constituer un dossier et le déposer auprès de l’Administration fiscale.

Ce dossier est en principe composé des éléments suivants:

  • Une lettre explicative sur l’origine de tous les fonds étrangers ainsi que les documents justificatifs qui s’y rapportent ;
  • Un tableau de patrimoine également sur la période concernée ;
  • Les déclarations des revenus rectificatives (formulaires n°2042, 2047, 3916-3916 Bis …) et, le cas échéant, les déclarations ISF ou IFI rectificatives ;


  • La totalité des justificatifs qui se rapportent aux avoirs détenus à l’étranger et aux revenus qui constituent ces avoirs sur la durée concernée par le dépôt de déclarations rectificatives :
  • Attestation prouvant que vous êtes titulaire du compte ou contrat d'ouverture de compte ;
  • En cas de clôture éventuelle, tout document un flux financier de clôture ;
  • États de fortune ou relevés de patrimoine au 1er janvier de chaque année de référence ou au 31 décembre de l'année qui la précède (il faut fournir ces documents pour les 10 années concernées par la régularisation) ;
  • États annuels des revenus fournis par l'établissement bancaire étranger ou l'organisme financier afin de prouver l'existence de gains que ce soit des intérêts, des dividendes, des plus values ou des moins values ;
  • Relevés des comptes bancaires sur les 10 ans concernés par la régularisation.

A noter que le dépôt d’un dossier de régularisation de manière spontanée ne permet pas d’éviter l’application des amendes et des pénalités. En revanche, un dépôt spontané peut permettre de les limiter.

5- Que faire en cas de réception d’un courrier n°751-SD ou en cas de pré-cochage de la case 8UU ?

Les contrôles effectués par l’Administration fiscale ont vocation a devenir de plus en plus fréquents du fait de l’importance des données bancaires automatiquement reçues. En effet, de plus en plus d’informations sont transmises par les pays étrangers.

Aussi, en pratique, lorsque l’Administration fiscale a reçu des informations qui révèlent que le contribuable détient un ou plusieurs comptes étrangers, elle le manifestera ainsi qu’il suit :

L’Administration fiscale pré-cochera la case 8UU du formulaire n°2042 de la déclaration des revenus ; dans cette hypothèse, le dépôt d’un dossier de régularisation spontané est recommandé afin d’éviter un contrôle fiscal plus contraignant ;

L’Administration fiscale se rapprochera des contribuables en leur rappelant leurs obligations concernant leurs comptes étrangers. Il s’agit d’une sorte d’avertissement pour inciter les contribuables à effectuer une régularisation spontanée. Les contribuables reçoivent alors un ou des courriers portant le numéro 751-SD, de la part d’un Pôle de Contrôle des Revenus et du Patrimoine (PCRP).

En cas de réception de ce type de courrier, le contribuable doit constituer un dossier de régularisation de compte étranger, sincère, complet, et correctement construit.  A noter qu’une attention toute particulière devra être apportée concernant l’origine des fonds.  Le contribuable devra être en mesure de fournir des documents venant à l’appui de ses explications. En effet, si le contribuable ne parvient pas à produire les justificatifs nécessaires pour prouver l’origine des fonds détenus sur ses comptes, l’Administration fiscale peut, dans certains cas, appliquer une taxe de 60 % sur ses avoirs (60% du plus élevé montant des avoirs présents sur vos comptes au cours des 10 dernière années).

A noter qu’en cas de réception du courrier 751-SD de demande de régularisation, il ne s’agira pas juridiquement d’un contrôle fiscal. Si la démarche de régularisation est effectuée après la réception de ce courrier, la spontanéité de la démarche reste juridiquement valable. La réception de ce courrier peut être la dernière chance pour le contribuable de procéder à une régularisation spontanée. A défaut, il sera susceptible d’encourir de lourdes sanctions puisque l’Administration fiscale corrigera elle-même les déclarations, avec des conséquences souvent très lourdes en termes de redressements.

6- L’assistance d’un conseil est-elle obligatoire afin de régulariser sa situation ?

L’assistance d’un conseil n’est pas obligatoire dans le cadre du dépôt d’un dossier de régularisation spontanée ou à la suite de la réception du courrier 751 -SD, toutefois elle est fortement recommandée.

En effet, le report des différents revenus générés par le compte étranger sur les différents formulaires, l’analyse des conventions fiscales afin de déterminer les modalités d’élimination des doubles impositions, la détermination de la plus-value de cession de valeurs mobilières, le calcul des droits de donation ou succession, le cas échéant, sont autant d’éléments techniques et complexes à analyser dans le cadre du dépôt d’un dossier de régularisation auprès de l’Administration fiscale.

Aussi, grâce à ses connaissances fiscales au niveau national et international, l’assistance d’un fiscaliste, sur ce type particulier de dossier, garantira au contribuable la conformité du dossier de régularisation avec les réglementations applicables. Le recours à un conseil permettra également de bénéficier des différents avantages auxquels le contribuable pourrait prétendre (notamment les crédits d’impôt étranger), et d’une atténuation des sanctions prévues (amendes, majorations, intérêts de retard) dès lors que le dossier constitué est sincère et complet.

La procédure de régularisation n’étant plus « normée », un travail de négociation important peut s’imposer avec l’Administration fiscale, notamment pour négocier l’absence de poursuite pénale ou limiter le montant des amendes et des pénalités. Là est donc toute l’importance d’être assisté d’un conseil dans le cadre de sa procédure de régularisation.




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